Pour la 5ème année consécutive, le nombre de naissances a baissé en France. Les raisons de ce phénomène sont connues : des femmes qui conçoivent leur bébé de plus en plus tard et un mode de vie de moins en moins favorable pour concevoir. Au-delà du phénomène sociétal, de nombreux couples sont aussi confrontés à des problèmes médicaux entraînant un parcours souvent difficile pour devenir parents. De plus pour certains d’entre eux, il n’existe aucune raison scientifique à leur infertilité. On parle alors d’infertilité inexpliquée. Mais quelle que soit la raison d’une infertilité, un soutien psychologique est nécessaire afin de mieux vivre son parcours médical ou alors pour comprendre et lever les différents blocages. Ce soutien est une aide précieuse au quotidien lors de la période de préconception et peut même permettre de devenir enfin parents. Explications de la psychologue Paola Scemama-Ittah sur le lien entre psychologie et fertilité.
Infertilité médicale ou « inexpliquée »
Il convient d’abord de discerner 2 situations différentes liées à l’infertilité du couple : l’infertilité pour raison médicale (qui débouche le plus souvent sur une PMA) et l’infertilité dite « inexpliquée », c’est-à-dire sans raison médicale.
Infertilité médicale, le parcours pour concevoir son bébé
Dès le début du parcours médical et tout le long de celui-ci, des soutiens humain et psychologique sont nécessaires et permettent à la patiente de mieux appréhender son parcours, de mieux le comprendre, de mieux préparer son corps et sa tête.
En effet, on a donné des abréviations pour tout : OPK, PMA, FIV, J1, J2…. Et on oublie souvent le côté humain. L’univers médical paraît parfois comme déshumanisé, surtout en parcours de PMA. Accompagner le couple lui apporte un côté humain dans cette épreuve. La femme (ou le couple) a besoin d’en parler, de témoigner, d’échanger et le soutien psychologique lui permet cela. Le couple ainsi rassuré, épaulé, soutenu, c’est une aide complémentaire pour le médecin qui pourra alors soigner ses patients avec plus d’efficacité.
Un sentiment de culpabilité
L’une des principales épreuves psychologiques lors d’un parcours de PMA est la culpabilité d’avoir un souci médical, penser que c’est de sa faute, la faute de son conjoint, la faute des deux. Autre épreuve, le fait de passer plusieurs examens, faire plusieurs essais et subir de nombreux échecs avant de pouvoir y arriver. Le parcours médical est souvent un marathon. Enfin, nous subissons tous la pression directe ou indirecte de l’entourage. Parfois cette pression part d’un bon sentiment mais elle peut s’avérer un redoutable facteur bloquant.
L’importance d’un soutien psychologique
Dans ce contexte, le soutien psychologique permet déjà au couple de tenir bon sur la durée. Etre soutenu dans l’attente de son prochain rendez-vous ou examen, être soutenu après les examens, voilà qui aide les futurs parents à se sentir moins seuls. Autre travail à accomplir sur le couple en parcours de PMA, les aider à enlever ce sentiment de culpabilité qu’ils ressentent. On les aide à comprendre et à accepter la situation pour mieux avancer.
Enfin, dans certains cas, recevoir des conseils psycho, libido ou sexo peut s’avérer très utile. Il s’agit alors d’enlever ce caractère obligatoire, machinal et souvent terrible des rapports dans le seul but de concevoir. Et de rendre de nouveau ces moments plus ludiques, désirables, avec des astuces, des changements.
Infertilité inexpliquée
Dans 10 à 15 % des cas, l’infertilité est d’origine inexpliquée du point de vue médical. Comme dit précédemment, lorsqu’il n’y a aucune explication échographique et que l’ensemble du bilan est normal, la patiente est d’abord soulagée d’avoir une anatomie et une fonction de reproduction normales. Mais ensuite survient un sentiment d’impuissance et de questionnement : qu’est-ce qu’on va bien pouvoir faire de nous ?
Toutes celles qui ont des enfants peuvent en témoigner, on nous donne essentiellement des conseils sur la grossesse, du type « dors beaucoup pendant ta grossesse ». Mais on nous parle rarement de l’avant, la période de conception. On nous donne même l’impression que concevoir est facile. On cite en exemple 3 femmes qui sont tombées enceintes dès le premier essai, mais on ne parle que très rarement de celle qui a galéré entre trois à quatre ans. Et pourtant elles sont beaucoup plus nombreuses que prévu. Et de plus en plus.
L’envie de tout maîtriser, ennemi de la femme
S’il y a bien quelque chose qui nous caractérise nous les femmes, c’est qu’au-delà de la galère commune que l’on a pu traverser, qu’on traverse ou qu’on traversera dans cette envie de concevoir des bébés, c’est notre envie malgré tout de tout maîtriser ! Au moment de la conception ce sentiment est décuplé ! On est dans la culture du tout, tout de suite depuis quelques années. Alors pourquoi ne pas avoir tout et tout de suite quand on décide aussi d’avoir un bébé ? On veut et on pense à tort que l’on aura cet enfant quand on le décide. Et c’est là que je vais donner 3 mots que l’on connaît toutes : culpabilité, fatigue, pression.
La culpabilité entre autres de ne pas y arriver, de ne pas être « normale », de ne pas tout comprendre au cycle et à l’ovulation. La fatigue entre autres de courir pour chaque rendez-vous, de devoir faire semblant d’être bien alors que l’on est stressée, d’y penser avant même de poser un pied à terre pour prendre sa température, de tous les traitements qui peuvent s’enchaîner. La pression enfin d’avoir un premier enfant, puis d’en avoir un autre d’un sexe différent du premier, d’être parfois trop jeune ou trop âgée aux yeux des autres. Tout cela (et bien d’autres choses) entraîne ce que l’on appelle « la charge mentale ».
La charge mentale, ennemie de la fertilité
Bien évidemment et tout le monde le sait, le corps et l’esprit sont liés. Mais avant d’aller plus loin dans l’explication du blocage psychologique, je voudrais spécifier qu’il s’agit d’un problème aussi bien féminin que masculin. C’est-à-dire qu’il n’est pas propre seulement à la femme (malgré notre besoin de tout maîtriser) mais qu’il s’agit plutôt d’un problème de couple qui peut toucher l’un ou l’autre ou les deux.
Comment cela fonctionne ?
Nous savons déjà qu’il existe un lien entre le cerveau et les hormones. On l’appelle l’axe hypothalamo-hypophysaire- ovarien. Cet axe joue un rôle essentiel dans le cycle menstruel en sécrétant deux hormones appelées gonadotrophines : la FHS et la LH qui régulent la sécrétion des hormones féminines que sont les œstrogènes et la progestérone. L’axe hypothalamo-hypophyso-ovarien semble être réglé comme du papier à musique.
Mais c’est sans compter sur les facteurs externes comme les traumatismes passés ou les peurs. De plus, le stress agit lui aussi sur une hormone appelée le cortisol (produite par l’hypothalamus aussi). Nous savons par exemple que le stress peut induire un retard voire une absence de règles. Ou alors une diminution et une moins bonne mobilité des spermatozoïdes. Comme ce n’est pas « palpable », pas mesurable, on parle d’infertilité inexpliquée ! Il fut un temps où pour faire un enfant il suffisait de faire l’amour. Aujourd’hui faire un enfant, c’est arrêter un moyen de contraception et se poser un tas de questions ! Consciemment ou pas. Ce qui devait être une libération est devenu une charge d’angoisse !
Alors comme une évidence, on a besoin d’en discuter
Au lieu d’être uniquement anéantie par des réflexions de personnes qui n’y connaissent rien, de ces anonymes du digital venant sur n’importe quel site et qui ne vont vous dire que le négatif. Il est donc utile, très utile même, d’avoir un suivi humain, psychologique en parallèle du parcours médical, quelle qu’en soit la difficulté.
Comment s’y prendre ?
Le mieux est de faire la liste des charges mentales lors du moment du désir de conception. Les traumatismes, les angoisses, les questionnements qui peuvent vous perturber. Ensuite il faut en parler. Mais pas à n’importe qui. A une personne bienveillante, qui ait assez de recul pour vous dire franchement les choses tout en vous guidant car elle va apprendre à vous connaitre. Cela peut se faire comme dit précédemment lors d’un suivi médical, lorsque ce dernier est nécessaire.
Lâcher prise, apprendre à résister à la pression, communiquer, se faire aider, se faire suivre, se laisser guider… Il n’existe pas de solution miracle pour résoudre ses problèmes de fertilité. Mais un renfort psychologique permet sans aucun doute d’augmenter ses chances de lever les blocages, pour enfin toucher son rêve de devenir parents.
AUTEUR : PAOLA SCEMAMA-ITTAH
Neuropsychologue et coach neuro-émotionnelle. Membre du comité d’experts de MYBUBELLY. Avec ses formations de psychologue, neuropsychologue et coach neuro-émotionnelle, Paola Scemama-Ittah a l’habitude de répondre de manière efficace aux diverses problématiques que rencontrent toutes les générations.
Conseils pratiques et suivi personnalisé font son quotidien.
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