Je viens à vous pour vous parler d’un sujet qui me tient à cœur : le syndrome du bébé secoué. Cette maltraitance a touché ma famille, mon Tom tué à l’âge de 4 mois, secoué par sa nouvelle assistante maternelle. Je tiens à préciser qu’à aucun moment, mes mots ou ma colère que vous pourriez ressentir dans ces lignes ne s’adressent à la profession d’assistante maternelle mais à cette personne exerçant ce métier.
Qui suis-je ?
Je suis Bertrand Gimonet, papa de 4 enfants dont le second est décédé en octobre 2014 suite à des secouements effectués par sa nourrice. Cet événement a bouleversé ma vie, la vie de ma famille. Après le décès de mon fils une nouvelle vie s’est imposée à moi. Quelques mois après son décès, j’ai souhaité donner du sens à sa mort en parlant de cette maltraitance. Je m’engage auprès d’associations telles qu’Enfance et Partage, Association Tatiana afin que cette maltraitance ne soit plus taboue en en parlant auprès des médias, professionnels de santé et de la petite enfance, mais également à l’Assemblée Nationale. Cette prévention m’a amené à écrire un livre jeunesse (La rentrée de Tom, bébé secoué) et à offrir un outil permettant d’aider tous les professionnels et parents.
Voilà presque 6 ans après son décès, nous avons eu 2 autres enfants, nous avons retrouvé de la joie de vivre même si à certains moments nos souvenirs nous rappellent cette triste réalité. Un message à retenir pour tous les parents endeuillés : Battez-vous ! Aimez la vie ! Rien n’est impossible !
Mon histoire
Notre première nourrice ne pouvant pas garder nos 2 enfants ensemble faute d’extension d’agrément accordée, après de très nombreuses visites, ma compagne et moi-même avons choisi cette assistante maternelle que j’appellerai Béatrice. Dès septembre 2014 et après une période d’adaptation classique de 15 jours, Béatrice garde nos 2 enfants 4 jours par semaine. La suite des événements est tragique pour mon Tom. Le lundi 29 septembre 2014, je reçois un coup de fil de ma compagne :
Viens vite, Tom a fait un arrêt cardiaque chez elle.
Me voilà dans ma voiture fonçant chez elle, croisant le SAMU sirène hurlante, je les laisse passer et comprends vite que cette ambulance est pour mon Tom. Arrivant sur place, je vois un pompier sur mon Tom lui faisant un massage cardiaque. Le SAMU prend le relais. Après de longues, très longues minutes son cœur repart. La vie l’a repris. Il est envoyé en hélicoptère au CHU de Besançon où une autre vie commence pour nous au chevet de notre fils.
L’annonce de la maltraitance « syndrome du bébé secoué »
Après de multiples examens, le mardi 30 septembre à 21h30, on m’annonce que mon fils a été maltraité, maltraité plusieurs fois. J’entends pour la première fois les mots « syndrome du bébé secoué ».
Mon fils a été secoué 3 fois :
- le vendredi 19/09, j’avais récupéré mon fils dans un état anormal. Malgré une visite chez médecin le lendemain matin pronostiquant une rhino-pharyngite, nous nous ne sommes pas inquiétés.
- le mercredi 24/09, il a été emmené aux urgences pédiatriques de Belfort. 4 jours d’hospitalisation pour un diagnostic erroné : allergie à la protéine de lait de vache.
- ce terrible vendredi 29/09…son arrêt cardiaque.
12 jours de coma
12 jours de coma, 12 jours à voir mon fils tenu en vie grâce à un respirateur, 12 jours d’examens plus tard pour constater que son cerveau est mort et que la décision de le débrancher doit être prise. 2h15 plus tard, mon fils est mort dans mes bras.
Le procès de l’assistante maternelle et mon engagement au sein d’associations
Des mois et des années d’instruction plus tard, mi-octobre 2018, le procès de Béatrice aux assises de Besançon a lieu. 2 jours de procès où malheureusement nous n’avons pas eu toutes les réponses ni d’excuses pour son geste. Elle a été condamnée à 7 ans de prison ferme et 5 ans d’interdiction d’exercer.
Voilà déjà 4 ans que je m’engage dans la prévention du syndrome du bébé secoué au sein d’associations comme Enfance et Partage. Je n’ai pu jouer le rôle de père, protéger mon enfant et l’empêcher de mourir mais je peux lui rendre hommage en parlant de cette maltraitance, vous en parler.
Qu’est-ce le syndrome du bébé secoué ?
Le syndrome du bébé secoué est un traumatisme crânien non accidentel, infligé par un adulte. C’est le secouement qui provoque le traumatisme crânien. La tête du bébé est ballottée d’avant en arrière. Le cerveau choque la boite crânienne provoquant le déchirement des vaisseaux sanguins entourant le cerveau, des saignements et aussi des lésions cérébrales.
Pour ceux ne se rendant pas compte de l’impact sur le cerveau, c’est comme si le bébé subissait un choc frontal, en voiture, à plus de 90km/h, avec tonneau.
- Le plus souvent ce drame arrive lorsque l’adulte s’occupant de l’enfant est exaspéré par ses pleurs et perd le contrôle. Il secoue alors le bébé.
- Le syndrome du bébé secoué touche plusieurs centaines d’enfants par an et concerne principalement les enfants de moins d’un an, dans 2/3 des cas des enfants de moins de 6 mois.
- Dans 55% des cas le secouement est réitéré.
- Plus de 10% des bébés décèdent.
- 75% des bébés secoués garderont des séquelles physiques et mentales irréversibles : intellectuelles, comportementales, visuelles et motrices.
- Tous les milieux socio-économiques, intellectuels et culturels peuvent être concernés.
- L’auteur est en premier un homme vivant avec la mère, la gardienne de l’enfant, puis plus rarement la mère.
Que faire lorsque l’on se sent dépassé ?
- Couchez l’enfant bien en sécurité sur le dos dans son lit.
- Quittez sa chambre, pour vous calmer.
- Appelez votre conjoint ou un ami de confiance pour prendre le relais.
- Appelez votre médecin, la PMI, une ligne d’écoute comme « allo parent bébé » au 0 800 00 3456.
- Prenez des respirations longues et profondes.
- Ecoutez de la musique, allumez la télé.
- Prenez un livre, une douche…
Ne pas savoir gérer les pleurs de son bébé ne fait pas de vous un mauvais parent. Un enfant ne risque rien à pleurer dans son lit, mais risque tout dans les bras d’un adulte exaspéré.
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